La question du leadership sur le terrain est un point de discorde depuis quelques années à l’AS Monaco, et compte tenu de la jeunesse de l’effectif du club et de la stratégie mise en place, c’est un point sans doute plus pertinent qu’ailleurs.
Wissam Ben Yedder a porté le brassard pendant de nombreuses années avant de partir à la fin de son contrat cet été, mais il n’a jamais été un leader vocal. Souvent décrit comme un « leader technique » en interne, son poste de capitaine a été ressenti comme un défaut, compte tenu de son importance pour l’équipe en tant que buteur de la majorité des buts.
Un nouveau leader
Ses qualités de leader ont cependant été remises en question et la capitulation de Monaco vers la fin de la saison 2022/23, au cours de laquelle le club a raté toutes les formes de football européen, a été attribuée à un manque de leaders dans le vestiaire.
Ce besoin de leaders a été comblé à l’été 2023. Comme l’a révélé l’ancien manager Philippe Clément, il souhaitait recruter lui-même Denis Zakaria, mais en vain. Il est arrivé quelques mois plus tard et quelques semaines après le départ de Clément. S’il n’a pas porté le brassard, du moins pendant sa première saison, il était ce leader vocal, cette tête stable dont cette jeune équipe monégasque avait besoin sur le terrain.
Les qualités de leader du Suisse sont vantées par ses coéquipiers. « Denis est un bon leader. Il apporte de l’unité à l’équipe », a commencé Mohammed Salisu. « En tant que capitaine, il sait quand parler avec les jeunes joueurs et sait quand mettre plus de pression sur eux. C’est la première fois que je suis dans un tel vestiaire ; il y a une telle unité. »
Pour beaucoup, le brassard de capitaine est un symbole creux : s’il y a des leaders dans le vestiaire et qu’ils sont habilités à diriger, c’est suffisant. Zakaria l’a fait lors de sa première saison à Monaco, où le club a obtenu une deuxième place, guidant le club vers la Ligue des champions.
Une carrière relancée après un passage à Chelsea
Lorsque Ben Yedder est parti, il y avait un candidat clair pour hériter du brassard, même malgré l’arrivée de Thilo Kehrer cet été, un joueur avec des qualités de leadership similaires et du même âge. « C’est une grande chose d’être nommé capitaine. Ce n’est pas tous les jours et c’est un privilège. Je parlerai plus souvent, j’aiderai mes coéquipiers, mais ce sont des choses que j’ai faites sans le brassard aussi », a déclaré Zakaria lors de sa nomination au poste de capitaine, un an seulement après avoir rejoint le club.
Pour Monaco, Zakaria a été la pièce manquante. Le talent était là mais il y avait un équilibre qui manquait auparavant. Il y avait des joueurs expérimentés, certes, mais ni Ben Yedder, ni Guillermo Maripán ou Kevin Volland, tous trois partis depuis, ne peuvent être considérés comme des figures de proue ou des leaders du vestiaire, même s’ils ont tous joué un rôle important dans le succès du club au fil des années.
Mais l’arrivée de Zakaria a aussi été très bénéfique pour le joueur en question. Il a eu du mal à se faire une place lors d’un prêt chaotique à Chelsea avant de revenir à la Juventus, où il n’avait aucun avenir. Au début de ses meilleures années, il cherchait à relancer sa carrière.
« Ma carrière a repris ? Certainement. Ce n’est jamais facile de faire une saison où l’on joue si peu. Faire une saison où j’ai joué presque tous les matches, ça m’a fait beaucoup de bien mentalement et surtout physiquement », déclarait Zakaria vers la fin de la saison dernière.
L’absence de Zakaria s’est fait sentir
Cette saison, il a retrouvé son rythme. Que ce soit en tant que défenseur central dans une défense à trois ou dans son milieu de terrain plus familier, il s’est distingué par son style langoureux et sa capacité à percer les lignes avec une facilité apparente, se révélant un atout précieux pour permettre à Monaco de battre le pressing. « Couteau suisse » est le terme utilisé pour décrire un joueur polyvalent en français – un terme qui convient à Zakaria à plus d’un titre.
Il a réalisé le deuxième plus haut pourcentage de passes réussies en Ligue 1 la saison dernière, le neuvième plus haut pourcentage des cinq premières divisions européennes, et s’est également classé dans le top 10 de Ligue 1 pour les passes réussies. Ce sont généralement de bons indicateurs de la capacité d’une sentinelle et Zakaria se classe très bien.
Il est devenu si important à la fois avec et sans possession du ballon et son absence se fait très souvent sentir. Avec Zakaria cette saison, les Monégasques ont remporté 66% de leurs matchs toutes compétitions confondues, ce chiffre tombe à 44% sans lui et à seulement 33% en Ligue 1 (deux victoires sur six).
Un binôme en forme
Soungoutou Magassa est un remplaçant compétent, bien qu’inconstant en raison de son âge, mais il est également notable que Lamine Camara ait semblé moins à l’aise avec son capitaine à ses côtés lors de certaines rencontres. Camara a, d’une manière générale, réalisé d’excellentes performances depuis son transfert, atténuant le départ de Youssouf Fofana, et cela peut être attribué à la présence apaisante de Zakaria et à sa capacité à guider le milieu de terrain sénégalais, qui en est à sa première saison au plus haut niveau. Un capitaine fait paraître les autres meilleurs autour de lui et Zakaria le fait certainement.
À bien des égards, il est le vecteur des idées d’Adi Hütter. Ayant travaillé avec l’Autrichien dans trois clubs différents, aux Young Boys, au Borussia Mönchengladbach et maintenant à Monaco, les deux hommes entretiennent une relation spéciale et étroite. Une telle relation entre le capitaine et l’entraîneur, loin d’être une évidence dans le monde du football, permet le bon fonctionnement d’un club, favorise l’unité et permet une transmission claire des idées, ce qui signifie qu’elles sont mieux mises en œuvre sur le terrain.
Cela se voit dans les résultats, Hütter détenant actuellement le record de pourcentage de victoires pour un entraîneur monégasque. Binôme complémentaire, Zakaria et Hütter ont été les protagonistes du retour du club de la Principauté au premier plan du football européen. Monaco est connu pour faire des carrières, mais l’exemple de Zakaria montre que le club a aussi à cœur de les relancer.